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(source: Hamarkada) |
Andi Arief, conseiller en gestion des désastres
naturels du président de l’Indonésie, a tweeté à ses « followers », en
novembre 2010, la nouvelle selon
laquelle un tsunami allait s’abattre sur le pays. Son compte avait été piraté
et les usurpateurs diffusaient de fausses alertes (source: Graham
Cluley).
En janvier 2011, les usagers de Twitter ont déclenché une alerte majeure à la
sécurité à Londres en faisant circuler la nouvelle selon laquelle un homme armé
tirait des coups de feu sur Oxford Street. La nouvelle était fausse : il
s’agissait d’une manœuvre policière qui a été mal interprétée (sources : Mark Prigg et Justin Davenport; Andrew
Hough et Kerry Cunningham).
À la même époque, le membre du Congrès américain Gabrielle Giffords a
reçu une balle dans la tête à Tucson (Arizona). La nouvelle de sa mort circule
comme une traînée de poudre sur Twitter.
Elle est tweetée par l’agence Reuter et retweetée par NPR News et BBC News. La
dame a été opérée et se porte bien aujourd’hui, merci (source : Steve
Safran et AFP).
Ces fausses nouvelles
(mentionnées dans un diaporama de Greg
Marra) ont circulé rapidement. Elles ont été invalidées peu après leur publication.
Mais dans le délai, des membres de la twittersphère les ont vécues comme
réelles.
Selon Serge Proulx, la réalité
virtuelle transforme le rapport à la vérité. En effet, les objets qu’elle met
en scène transcendent la simple représentation et deviennent vrais, dans la
mesure où ils sont expérimentés
par les sujets (source : Communautés
virtuelles). Les usagers illusionnés de Twitter
ont expérimenté la panique, l’angoisse ou l’affliction liée au décès d’une
personnalité publique. Cette expérience est irréversible, qu’elle soit fondée
sur une information vraie ou fausse.
La circulation de fausses
nouvelles n’est pas un phénomène récent (voir les exemples extrêmes que sont l’Opération
Fortitude et les Protocoles des
Sages de Sion), mais ils prennent une toute autre dimension grâce aux
outils du web social et à la propagation virale.
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(source: Influenza-H5N1.org) |
Dans un premier temps, la propagation
virale accélère la circulation des canulars, de sorte qu’un nombre important
de personnes auront été bernées avant que ceux-ci aient été invalidés. En
contrepartie, l’invalidation du canular risque de ne pas rejoindre l’ensemble
des personnes illusionnées. D’abord parce que la viralité ne se commande pas.
Ensuite, parce que la fausse nouvelle peut s’avérer plus attrayante et
sensationnaliste que sa démystification, ce qui en fait une moins bonne
candidate à une propagation virale (à titre d’exemple, dans un quotidien, une
nouvelle inexacte peut faire la une et l’erratum, se trouver en page 65, juste
après le courrier du cœur). Enfin, parce que les moteurs de recherche
conserveront tout autant les traces du canular que les démonstrations de son
imposture et que les secondes ne seront pas nécessairement mieux référencées
que les premières, et on sait ce qu’a de crucial le référencement pour la
visibilité.
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(source: OWNI) |
Dans
un deuxième temps, si la force du nombre favorise une invalidation rapide des
fausses nouvelles grâce aux effets de la vigilance
participative, la démultiplication des sources indépendantes d’informateurs
sur les blogues et les réseaux sociaux peut conduire, à l’inverse, à un
phénomène de crédibilisation tautologique de l’information qui augmente la possibilité
qu’un canular passe pour une nouvelle authentique. Dans Critique
de la communication, Lucien Sfez décrit la tautologie par cette
formule : « je répète donc je prouve ». Ainsi, une nouvelle est
lancée par un usager X qui la transmet à son graphe social. Chacun des éléments
du graphe transmet la nouvelle à son propre graphe, puis la visibilité de celle-ci grossit au
point d’attirer l’attention d’un média institué, source de confiance. Tous les
autres médias qui relaieront ensuite la nouvelle croiront alors avoir une
nouvelle crédible entre les mains (sur la différence entre confiance et
crédibilité : INF
6107).
Quelle serait la principale conséquence de la
multiplication des canulars dans le cadre du web social? L’expérimentation d’une
succession de réalités alternatives (sur l'expérimentation de l'actualité, voir Jean-Louis Weissberg), de réalités en puissance mais non
physiquement advenus, donc, de réalités virtuelles (source : Proulx
et Latzko-Toth). Et si l’on
en croit les propositions des tenants de la construction de la réalité sociale
en communication, les fausses nouvelles pourraient s’avérer aussi réelles que
les nouvelles que nous considérons comme vraies (source : Danielle
Charron, p. 39-42).
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