jeudi 29 décembre 2011

Les mutations du champ de l'audiovisuel et le web social: Deuxième partie

DEUXIÈME PARTIE

(source: Cyberpresse)

Prospective : l’avenir de la nouvelle programmation

Le web social dans son ensemble est un phénomène en expansion. Les trois graphiques suivant montrent l’évolution des réseaux sociaux Facebook et Twitter, ainsi que la progression du nombre de blogues créés sur le web. Leur ascension fulgurante est significative pour le succès du web social.

   

(sources des données : Huffington Post, Journal du Geek, Médias Sociaux, Memoclic, TechCrunch, Webdeux.info)

(source des données: Wikipédia)

Le tableau ci-dessous indique une hausse de 5,5% à 41% de la présence et de la participation des Québécois sur le web social entre les années 2009 et 2010. Le tableau suivant concerne l’année 2011. Nous avons croisé le pourcentage de la population québécoise adulte active sur les médias sociaux avec la courbe de la diffusion de l’innovation d’Everett Rogers, de manière à faire le point sur le degré d’adoption de ceux-ci actuellement. Les résultats indiquent que les médias sociaux sont déjà un phénomène de masse et qu’ils progressent encore, puisqu’ils ont à rejoindre les deux-tiers de la majorité tardive des adoptants et les retardataires, soit environ 40% de la population.

Par contre, les activités comme la création de contenus et le relai d’informations, qui sont partiellement le fait des créateurs de contexte, des programmateurs amateurs et des actifs créatifs, proviennent d’une minorité d’usagers et ne touchent que les adoptants précoces, dont une part de la majorité précoce. Au regard de l’engagement que la création de contenus exige en temps et en passion, il n’est pas dit que celle-ci connaîtra la popularité des médias sociaux en tant que phénomène global. Quant au relai de l’information, les statistiques nous apprennent qu’elles connaissent du succès : en 2011, la moitié des Canadiens considère que les réseaux sociaux enrichissent le champ de l’information, le tiers, qu’il s’agit d’une source d’information et le quart que cette source est fiable. Ceux qui en font usage ont deux fois plus de chances de tirer leurs informations de leur réseau d’amis ou de leur réseau familial que des médias qu’ils consomment.

Enfin, la consultation de contenus touche 70% des usagers des médias sociaux et 41% de la population présente ou non sur le web. Cette activité, plus passive que les précédentes, devrait encore progresser à court et à moyen terme.      


(source des données : CEFRIO)


 (source des données : CEFRIO)


Activité des québécois adultes sur web social, au regard de la diffusion
de l’innovation (sources : CEFRIO pour les tendances en matière de web
social et Wikipedia pour la courbe de la diffusion de l’innovation, d’Everett
Rogers). 
Le partage de fichiers est également une tendance lourde : plus de 25 milliards de contenus différents (vidéo, photographies, etc.) ont été échangés sur Facebook en 2010, soit 50 par usagers en moyenne (source : CEFRIO).

Toujours en 2010, il s’est téléversé plus de contenus audiovisuels sur YouTube en deux mois que les trois grandes chaînes américaines en ont diffusé en soixante ans (CEFRIO, 2010). Quotidiennement, 2 milliards de vidéos étaient vues sur ce site et 2 milliards sur Facebook mensuellement. Enfin, l’internaute moyen voit en moyenne 186 vidéos en ligne mensuellement.
L’année 2009 est une année pivot, car les internautes canadiens passent désormais plus de temps sur l’Internet qu’ils ne regardent la télévision hors ligne (18 heures hebdomadaires en moyenne contre 16,9 heures). De plus, le temps passé en ligne par les internautes a connu une hausse de 21% en un an (de 2008 à 2009), ce que la CEFRIO explique par la popularité de la webtélé (CEFRIO, 2010). Au Canada, la consommation de télévision hors ligne est en déclin. Pour l’ensemble de la population de 12 ans et plus, elle a diminué de 6,6% entre 2004 et 2008. Seuls les 55 ans plus échappent à cette tendance.

Tableau 1 – Heures d’écoute hebdomadaire moyenne par personne,
par groupe d’âge, au Canada (source des données : CRTC).

Le graphique ci-dessous montre une diminution des revenus de la télévision traditionnelle et une hausse en matière de télévision payante et de vidéos à la demande, qui répondent plus spécifiquement aux goûts des consommateurs. Le graphique suivant rend compte de la consommation de programmes audiovisuels sur l’Internet par les Canadiens en 2009.

Revenus de la radiodiffusion (millions de dollars) (Source : CRTC).

Graphique 1 - Téléchargement, lecture en continu ou visionnement d'émissions
de télévision sur Internet (source : CRTC).

L’ensemble des statistiques pointent vers une surreprésentation des 18-24 ans comme usagers des médias sociaux, une forte présence des 25-34 ans et une diminution de l’écoute de la télévision dans l’ensemble de la population. Ces tendances sont significative : elles indiquent que le modèle de la nouvelle programmation et l’usage de l’Internet comme lieu de consommation principal des contenus télévisuels que nous avons décrits pourraient continuer à jouer un rôle important dans le champ de l’audiovisuel à long terme, soit dans les 20 années à venir, comme l’est le modèle actuellement en déclin, dans lequel les télédiffuseurs et les télédistributeurs tiennent encore le haut du pavé. En effet, les 18-34 ans constituent aujourd’hui les tranches d’âge les plus populeuses au Canada, après les 40-55 ans, qui consomment encore massivement la télévision hors ligne. Dans 20 ans, cette génération, qui aura grandit avec le web, sera majoritaire et la génération suivante, quant à elle, n’aura pas connu l’ère pré-web (Statistique Canada, 2010). L’impondérable, dans cette tendance, demeure cependant la manière dont l’industrie culturelle annexera le champ de l’audiovisuel à moyen et à long terme (développera-t-elle une nouvelle forme de programmation ou récupèrera-t-elle les pratiques des acteurs du web social telles que nous les avons décrites?) et dont les gouvernements cloisonneront juridiquement le web pour protéger les droits d’auteurs.





Catalyseurs
La nouvelle programmation que nous venons de décrire repose essentiellement sur le web social, mais elle ne lui est pas entièrement tributaire. Voyons pourquoi.
Dans un premier temps, l’arrivée du magnétoscope, au début des années 1980, a libéré les téléspectateurs des contraintes temporelles liées à une grille de programmation fixe. On parle alors de délinéarisation des programmes, de leur extraction du flux télévisuel continu. La délinéarisation a été accentuée par l’arrivée du DVD, puis de la vidéo sur demande (CRTC, 2006). Dans un deuxième temps, l’invention de la télécommande a entraîné de nouveaux modes de consommation de la télévision, antérieurs à la délinéarisation : zapping, grazing, flipping et cruising sont autant de tactiques des téléspectateurs qui transgressent la logique de la programmation et transforment un flot continu d’images en une mosaïque (e-marketing.fr, 2004; Martin et Proulx, 1995). Dans un troisième temps, la multiplication et la spécialisation de l’offre télévisuelle de la câblodistribution et de la télévision par satellite, dans les années 1980 et 1990, ont permis aux téléspectateurs de s’affranchir de la logique grand-public et généraliste des diffuseurs nationaux (Sénécal, 1996; Martin et Proulx, 1995). Dans un quatrième temps, la convergence numérique a permis le déversement d’une multitude de contenus hétéroclites, disponibles en permanence et à profusion sur le web, et la possibilité, pour les téléspectateurs qui le désirent, de se détourner définitivement des télédiffuseurs classiques. Ces transformations les ont rendus plus exigeants face à la programmation qu’on leur proposait et le web social leur a donné le double moyen de leur ambition et de leur raffinement télévisuels.

De tels changements dans les habitudes de consommation des téléspectateurs paraissent, à première vue, irréversibles. Comme l’écrit Jean-Yves (2009), « le consommateur ne veut plus rester passif, il veut devenir un utilisateur actif ». Il serait en effet fort surprenant que ce dernier accepte à nouveau une restriction de la diversité télévisuelle qui lui est offerte aujourd’hui. Cependant, la libre circulation actuelle des contenus audiovisuels est un phénomène précaire, au regard de ce qui suit.

Le cloisonnement du web à l’aide des systèmes législatifs
Plusieurs lois ont été instaurées dans le but de protéger les droits d’auteurs de l’industrie culturelle. La France a adopté la loi HADOPI, qui prévoit des amendes et des privations d’accès à l’Internet pour les usagers qui téléchargent illégalement des fichiers musicaux ou vidéo. Au niveau de l’Union européenne, on retrouve l’IPRED. Aux États-Unis, deux lois à vocation commune sont présentement à l’étude : la SOPA et la PIPA. Au Canada, la loi C-59 criminalise le piratage dans les salles de cinéma (L’EXPRESS.fr, 2011; Philippe Meilleur, 2008; La Quadrature du Net, 2011). Enfin, l’Accord commercial anti-contrefaçon (ACTA) est un traité mis au point par 39 états (dont les États-Unis, le Japon et les 27 pays de l’Union européenne) pour protéger les droits d’auteurs, de marque et de brevet. Ce dernier pourrait, à court terme (sa ratification est attendue pour le début de l’année 2012), limiter la liberté d’expression et entraver la circulation des contenus culturels sur l’Internet, puisqu’il demande aux fournisseurs d’accès Internet de policer les activités de téléchargement des internautes (La Quadrature du Net, 2011). 

De nouveaux modèles commerciaux  

De nouveaux modèles d’offre télévisuelle sont instaurés, parallèlement à la télédistribution (câble et satellite) et à la télédiffusion; ils devraient les supplanter à mesure que les téléspectateurs convergeront vers le web (à court, moyen et long terme).  
Le premier modèle table sur la vente ou la location à la pièce : ce sont les boutiques en ligne telles qu’iTune ou le nouveau service de location de YouTube. Le second repose sur l’abonnement ; un prix mensuel donne accès à un catalogue de contenus ou de chaînes télévisées parmi lesquels le téléspectateur peut choisir. La variété dépend alors du niveau (et donc du coût) de l’abonnement. Le troisième modèle est celui des regroupeurs en ligne, à l’image de Hulu.com ; ce sont des portails qui offrent gratuitement des programmes visualisables à partir de leur site. En contrepartie, des publicités sont intégrées aux contenus. Le dernier modèle est celui de la webtélé ; de plus en plus de télédiffuseurs mettent à disposition des internautes une partie de leurs émissions ou du contenu exclusif au web. Là encore, c’est le financement par la publicité qui trône (Cyberpresse, 2011; CRTC, 2010).

Ces modèles ont ceci en commun qu’ils offrent une relative liberté au téléspectateur dans le choix des contenus et du moment où il peut les consommer. Cependant, la circulation des programmes est actuellement cloisonnée géographiquement (par le biais d’un contrôle de l’adresse IP) dans le cas des trois premiers modèles. Par exemple, les internautes non-américains ne peuvent obtenir des programmes dont les droits n’ont pas été négociés avec un télédiffuseur de leur propre pays. On demeure donc partiellement dans une logique de rareté, que l’on maintient artificiellement pour des raisons commerciales; l’ancien modèle est donc partiellement reconduit à court terme.


CONCLUSION
Le double cloisonnement juridique et commercial de l’Internet risque de freiner, à court et à moyen terme, soit dans les cinq années à venir, la diversité et l’accessibilité des contenus audiovisuels auprès des téléspectateurs, et plus encore à long terme, lorsqu’un nouveau modèle de programmation commercial aura réussi à s’imposer dans le champ de l’audiovisuel. Parallèlement, l’industrie culturelle devrait bénéficier des avancées en matière de systèmes informatisés de filtrage, de recoupement et d’analyse sémantique de l’information, ainsi que de reconnaissance optique [1] qui, couplés à une interprétation automatisée et intelligente des activités des téléspectateurs, pourraient aiguiller toujours plus efficacement les téléspectateurs dans leur recherche de contenus, en considération de leurs goûts et de leurs habitudes de consommation, mais aussi en fonction de leurs stratégies commerciales. Spécifions que ces avancées en matière d’informatique ne remplaceront pas les acquis du web social, mais s’alimenteront à même les données produites par ses usagers, dans un effet de synergie. Quant au modèle qui se développe actuellement au sein du web social,

Au regard des nouvelles formes de mainmise tentées par l’industrie culturelle sur le champ de l’audiovisuel, des intérêts financiers en jeu et du déséquilibre de pouvoir entre cette dernière et les acteurs du web social que nous avons présentés, les modalités de programmation permises actuellement par ces derniers risquent, à moyen et à long terme, d’être récupérées commercialement. Une telle appropriation permettrait à l’industrie culturelle de rendre plus efficients le marketing et la publicité, de générer des bénéfices supplémentaires en diffusant les créations des amateurs (machinimas, fanfictions, etc.), sans prendre de risques financiers, et de voir croître la popularité de leurs productions grâce à une publicité gratuitement générée par leurs fans les plus convaincus auprès de leurs réseaux sociaux. Ce qui favorise actuellement la liberté de choix du téléspectateur pourrait donc être retourné contre lui par l’industrie culturelle à moyen terme. Aussi, pour ces raisons, il serait surprenant que le modèle de programmation alternatif que nous avons présenté demeure  influent à long terme, soit dans 10 à 20 ans. Nous pensons que l’Internet sera bel et bien le lieu de convergence de l’ensemble des contenus audiovisuels et que le web social conservera son rôle d’informateur et de conseiller en matière de productions audiovisuelles, mais que la circulation des contenus sera plus sévèrement restreinte, le partage illégal de fichiers devenant de plus en plus juridiquement coûteux pour les internautes ou techniquement improbables.



[1] À titre d’exemple, un logiciel de reconnaissance faciale pourrait, en étant couplé aux banques de photos des réseaux sociaux, identifier les personnes figurant dans un vidéo amateur. Un logiciel de reconnaissance optique des caractères pourrait quant à lui classifier des films d’archives numérisés en lisant le contenu de leur générique et de leurs sous-titres ou encore identifier les lieux de tournage d’un film en repérant  la signalisation, les enseignes de magasins, etc.    

Les mutations du champ de l'audiovisuel et le web social: Première partie


INTRODUCTION
Convergence des médias sur le web

(source: 123RF)

L’industrie télévisuelle connaît actuellement un bouleversement en profondeur, en raison de la convergence numérique qui rapproche l’Internet et la télévision. À ce titre, Michel Sénécal écrit que
l’évolution prochaine (et actuelle) des technologies médiatiques […] se dessine dans la métaphore de l’inforoute multimédia et dans l’intégration progressive des réseaux et des services, techniquement permise en grande partie par l’avènement du paradigme numérique (Sénécal, 1996, p. 333). 

Au-delà de son aspect technologique, la convergence met en jeu des dimensions culturelles et économiques qui polarisent les médias entre, d’une part, la constitution de conglomérats médiatiques transnationaux et, d’autre part, des consommateurs en mesure de s’approprier les outils numériques qui les libèrent partiellement de leur emprise commerciale. Ces conglomérats mettent en péril la diversité culturelle au profit d’une culture standardisée et sérialisée, majoritairement en provenance des États-Unis[1] et circulant mondialement grâce à l’Internet et à l’amenuisement des barrières tarifaires à l’échelle internationale (Archibald, 2009, p. 17; Mattelart, 2007). En relation avec cette transformation de l’industrie culturelle, nous décrirons dans cet essai les modifications qu’entraînera dans les années futures le web social sur la circulation des contenus télévisuels. 
En première partie, nous nous intéresserons, d’une part, à la programmation télévisuelle telle qu’elle se décline actuellement, dans sa forme héritée de sa période analogique, avec sa logique de rareté. D’autre part, nous verrons comment les acteurs du web social remettent en cause ce modèle en redéfinissant la programmation et en remettant en cause la logique de rareté de l’industrie culturelle. En deuxième partie, nous dresserons un tableau prospectif de la programmation télévisuelle, afin de voir quelles formes elle devrait prendre à court, moyen et long terme, soit dans un, cinq et vingt ans.

PREMIÈRE PARTIE
Programmation et logique de rareté
La programmation des émissions télévisuelles était et demeure encore principalement le fait des télédiffuseurs. La fonction du programmateur est d’opérer un tri parmi l’ensemble de l’offre télévisuelle disponible et de le proposer à ses publics. Elle répond non seulement aux exigences de ces derniers, mais également aux exigences capitalistiques des propriétaires et des gestionnaires de la chaîne. Cette activité s’inscrit dans une logique de rareté en raison des coûts engendrés par la production et la diffusion des contenus audiovisuels. Les programmateurs remplissent donc la fonction de garde-barrières, cruciale pour la viabilité économique des diffuseurs. Ils déterminent les contenus qui seront ou non diffusés, selon des critères tels que la rentabilité (coûts de production ou d’acquisition des droits de diffusion par rapport au public potentiellement intéressé), l’adéquation entre les publicitaires et les spectateurs, la concordance entre les émissions et la plage horaire ou la période de l’année où elles sont diffusées et, enfin, la ligne éditoriale du télédiffuseur (Martin et Proulx, 1995; Sébastien Paquet, 2009).
En amont, l’industrie culturelle, concentrée entre les mains d’un nombre toujours plus réduit de conglomérats, contribue artificiellement à cette rareté en établissant des portefeuilles de films dont elle limite la circulation (Allard, 2005, p.168). Cet effet de rareté s’estompe en faveur d‘une nouvelle abondance grâce au partage des fichiers vidéo. Dans un tel cadre, le web social intervient afin d’organiser le flot audiovisuel.
Remise en circulation et médiation culturelle
Cinq types d’usagers du web social agissent de concert pour contrecarrer la logique de la rareté de l’offre et les stratégies commerciales de l’industrie culturelle, tout en organisant la nouvelle diversité des contenus audiovisuels : les hommes-films, les créateurs de contexte, les programmateurs amateurs, les fansubbers et les actifs créateurs. Ils contribuent à de nouvelles formes de programmation (si tant est que ce terme conserve sa pertinence dans un tel cadre), qui sont appelées à prendre de l’expansion à court et moyen terme, c’est-à-dire proportionnellement à l’expansion du web social. 
1.      Les hommes-films
Laurence Allard (2005) qualifie d’ « hommes-films » (en référence aux « hommes-livres » de Fahrenheit 451) les internautes qui « incarnent une mémoire cinématographique vive » en remettant en circulation, sur les plateformes de partage de fichiers, des films (nous ajouterons : des séries, des émissions télévisuelles et des œuvres d’art audiovisuelles) qui ont été peu ou pas visionnés au moment de leur création ou qui sont tombés dans l’oubli. Ils contribuent ainsi à sauvegarder le patrimoine audiovisuel mondial en court-circuitant les stratégies de rétention des contenus par l’industrie culturelle (p. 168) et offrent une alternative à la course à la nouveauté des programmateurs (et de la société de consommation en général) en rendant de nouveau disponibles des chefs-d’œuvre intemporels.


(source: Come 4 News)
2.      Les créateurs de contexte et les programmateurs amateurs
Les créateurs de contexte, pour reprendre la formule de Jean-Yves Le Moine, assurent la pérennité des contenus audiovisuels en les publicisant : ils trient le bon grain de l’ivraie, afin de hiérarchiser le flot de contenus, ils en parlent dans les réseaux sociaux, sur les messageries instantanées et les forums, ils écrivent à leur sujet dans leurs blogues, ils partagent des sites et des articles de référence à leur sujet, par le biais de signets sociaux, et ils créent des hyperliens pour en faciliter l’accès, ce qui a pour corollaire de baliser le web. Ce faisant, il s’effectue un filtrage collaboratif du paysage audiovisuel, par lequel les créateurs de contexte soulignent pour les internautes les contenus qui méritent leur attention, selon leurs goûts spécifiques, et constituent, lorsqu’ils sont pertinents et répondent adéquatement à ces goûts, des sources d’information dans lesquels ils ont confiance.
Les créateurs de contexte constituent de nouvelles instances légitimatrices officieuses, puisqu’ils sacrent « classiques » des œuvres méconnues et négligées par les instances légitimatrices officielles (médias traditionnels, critiques professionnels, universitaires, milieu scolaire, etc.). En ce sens, ils dépouillent les autorités cognitives et les institutions traditionnelles d’une part de leur pouvoir de consécration (au sens définit par P. Bourdieu dans Les Règles de l’art, 1998, p. 366-367) et  deviennent, à la différence de ces gardes-barrières de la culture, des « connecteurs » entre les spectateurs et les œuvres du champ de l’audiovisuel (Sébastien Paquet, 2009, module 4 : sections 3 et 5).  
Dans le contexte de la désintermédiation de la télévision qui s’opère sont l’influence du web, soit d’une diminution des acteurs qui s’interposent entre les contenus et leur consommateur, les créateurs de contexte deviennent de nouveaux médiateurs. Cependant, contrairement aux anciens intermédiaires (réseaux de télévision, journalistes, entreprises de syndication, etc.), ils jouissent d’une certaine souplesse et ne sont aucunement mus par des intérêts commerciaux. Leur travail est donc désintéressé et, corrélativement, plus proche des intérêts des personnes qu’ils informent et conseillent en matière de contenus audiovisuels.
Les médias sociaux (blogues, forums, wikis, réseaux sociaux, etc.) constituent des outils efficaces pour les créateurs de contexte, car ils démultiplient la portée de leur travail, au point leurs découvertes font parfois l’objet d’une propagation virale, à la suite de quoi des œuvres auparavant méconnues accèdent à une notoriété semblable aux blockbusters de l’heure.
Les créateurs de contextes, en plus de faire découvrir des œuvres, des répertoires et des cultures, contribuent également à structurer le web en communautés d’intérêts. Ces regroupements homophiles accélèrent la circulation des contenus audiovisuels, puisqu’ils sont formés de publics aux attentes et aux goûts semblables et qu’ils jouissent d’outils efficaces pour les publiciser et les partager, tels que les fils de syndication et les signets sociaux, par exemple (Sébastien Paquet, 2009, module 1 : sections 3 et 4).
Précisons qu’une grande part des activités qui hiérarchisent et filtrent le flot audiovisuel provient d’actions anodines, parfois posées involontairement. D’une part, les internautes évaluent les contenus qu’ils consomment : ils laissent une note, une mention « j’aime », un commentaire, etc. D’autre part, des systèmes de recommandation recoupent automatiquement les habitudes de consommation des usagers et suggèrent aux usagers suivants des contenus qui pourraient potentiellement répondre à leurs goûts. C’est sur ce principe que repose le succès d’Amazon, notamment.
3.      Les programmateurs amateurs
Les programmateurs amateurs sont également des créateurs de contextes, mais la manière dont ils organisent le web est plus spécifique : ils parcourent le champ audiovisuel et  agrègent plusieurs contenus ou sources de contenus audiovisuels (notamment des chaînes de télévision en ligne) dans un même espace. Leur activité est plus proche du modèle de la programmation des télédiffuseurs, dans la mesure où des contenus de plusieurs provenances sont réunis au même endroit. Cependant, contrairement à ce modèle, le contenu proposé est disponible lorsque l’usager le désire et non à un moment prédéterminé. Ces programmes amateurs, on les retrouve sur les plateformes de partage de vidéos tels que YouTube et Dailymotion, ainsi que sur l’aggrégateur web mobile de nouvelles Evri, par exemple. Ce dernier permet à ses membres de créer des canaux personnalisés dans lesquels plusieurs chaînes de télévision en ligne sont intégrées, conformément à leurs goûts. Il est possible, pour les autres membres, de suivre ces canaux dans leur propre page personnelle et aux non-membres de s’y abonner par le biais d’un fil de syndication.        

4.      Les fansubbers
Si la barrière de la langue a longtemps contribué à cloisonner le marché de l’audiovisuel et renforcé le pouvoir des garde-barrières de l’industrie culturelle, il existe désormais un moyen de passer outre ce problème et d’accéder aux œuvres étrangères : le fansubbing.  Le fansubbing est une activité typique du web participatif. Il consiste en la réalisation et en la mise en ligne de sous-titres d’émissions et de films par leurs prosélytes les plus convaincus : les fansubbers. Ces sous-titres prennent la forme de fichiers qui doivent être couplés aux fichiers vidéo d’origine. Ils sont alors incrustés à ce dernier.

(source: The Turtle and The Lizard)
Les fansubbers remplissent la fonction d’intermédiaires culturels, à l’image des programmateurs des chaînes télévisées qu’ils remplacent. Contrairement à eux, ils sont mus par le goût du partage et non par des objectifs pécuniaires. Selon Allard, « cette réversibilité des rôles culturels entre « professionnels de la profession » et publics amateurs représente un des premiers éléments de mise en crise du régime économique de l’industrie culturelle » (Allard, 2005, p. 165). Il s’agit également d’une alternative de poids à l’hégémonie culturelle occidentale, et plus spécifiquement américaine, dans le domaine de l’audiovisuel.
Le fansubbing, conjugué au partage de fichiers vidéo en mode peer-to-peer et aux activités de filtrage et de débroussaillage collectif et collaboratif du champ de l’audiovisuel, rend disponible un vaste répertoire de documents audiovisuels rares, méconnus du grand public ou étrangers (Allard, 2005, p. 162-165) et contrecarre les stratégies classiques des programmateurs (rendez-vous hebdomadaires, émissions populaires en prime time, etc.), car les téléspectateurs ne suivent plus l’agenda qui leur est imposé, les nouveaux épisodes et les nouvelles saisons d’une série étant disponibles en ligne (et donc à la demande), dans leur version sous-, environ 24 heures après la diffusion dans leur pays d’origine.

5.      Les actifs créateurs
Les « actifs créateurs » (selon la typologie de Le Moine, 2009) sont les acteurs les plus actifs du web social et les plus représentatifs de la culture participative, définie par H. Jenkins (2008) comme «culture dans laquelle les fans et d’autres consommateurs sont invités à participer activement à la création et à la circulation de nouveaux contenus» (cité et traduit par Sébastien François). Ils compensent leur faible nombre par une participation active dans la production, l’élaboration et la transformation amateurs des contenus télévisuels. Parmi les créations de cette catégorie d’usagers, on retrouve : les machinimas, les fanfilms et la fanfiction (ces trois phénomènes sont définis dans L'invention du quotidien 2.0: quelques pratiques de fans).
Ces trois formes de création étendent de manière exponentielle le corpus de productions grand public issues de l’industrie culturelle (par exemple, Harry Potter) sous forme de vidéos, de romans et de films d’animation. Ces pratiques constituent une forme de braconnage culturel au sens certalien du terme (de Certeau, 1990, p. 239-254), puisqu’elles sont le fruit de lectures poétiques, en tant que « source vive de création et d’invention » (Martin et Proulx, p. 211), de construction de sens qui s’insère dans les failles de la culture dominante, par opposition à une interprétation prédéterminée que les producteurs de l’industrie culturelle tentent d’imposer au spectateur (de Certeau, 1990, p. 249).
Les actifs créateurs contribuent à libérer les consommateurs des stratégies commerciales de l’industrie culturelle en produisant des extensions illégitimes de leurs œuvres et en les diffusant gratuitement, en abondance, en tenant compte des rétroactions de leurs lecteurs/spectateurs et à leur besoins, étant plus près d’eux et de leurs goûts que ne l’est l’industrie, et sans jouer sur la rareté pour créer artificiellement des attentes auprès de leur public. 
Dans le cadre d’une programmation en pleine transition, au sein de laquelle s’entremêlent (et s’entremêleront encore pendant plusieurs années) les activités des télédiffuseurs traditionnels et du web social, les activités des cinq types d’acteurs que nous venons de mentionner ne font pas que déterrer des œuvres du passé, ils influencent également les productions actuelles et à venir. D’une part, ils attirent l’attention des médias et de l’industrie culturelle sur des œuvres étrangères et illustrent leur potentiel commercial dans d’autres pays. Les programmateurs peuvent décider de les traduire et de les diffuser sur leurs ondes, alors que les producteurs peuvent décider d’en faire des remakes ou s’en inspirer pour créer leurs propres œuvres, adaptées aux goûts du grand public. D’autre part, ils relancent le succès d’œuvres oubliées, incitent les programmateurs à les rediffuser et convainquent les producteurs de leur donner des suites[2].      

Une division du travail de mise en circulation des contenus audiovisuels 
Les activités des cinq acteurs du web social et les outils (fils de syndication, systèmes de recommandation, etc.) que nous venons de décrire se complètent; ils entrent en interaction pour former un nouvel écosystème qui pallie les lacunes du marché de l’audiovisuel traditionnel. Cet écosystème est fondé sur les valeurs qui font le succès du web social : le partage, la participation et le bénévolat. Il en résulte une division du travail de mise en circulation des contenus audiovisuels qui constitue une alternative à la programmation traditionnelle à moyen terme, mais dont la survie dépendra du degré de contrôle qu’exercera l’industrie culturelle sur la circulation des contenus audiovisuels lorsqu’elle réinstaurera un nouveau régime de circulation des contenus audiovisuels adapté à la convergence numérique.
La division du travail de mise en circulation des contenus audiovisuels est un exemple d’intelligence collective affinée et optimisée par le web social : quiconque peut accéder à une offre de contenus diversifiée sans posséder de qualifications spécifiques, en participant à son succès (volontairement ou non[3]) et ce, tout en jouissant de l’expertise des autres usagers : connaissances encyclopédiques en matière de cinéma, de télévision ou de culture étrangère, capital culturel, compétences techniques, programmation informatique, capacité à définir les goûts des autres et à les conseiller adéquatement, etc. Elle se traduit par le passage d’une programmation généraliste, basée sur le plus petit dénominateur commun en matière de goût, à un filtrage collaboratif qui satisfait une multitude de publics aux goûts particuliers, voire pointus, tout en maintenant la possibilité d’accéder à des contenus populaires, appréciés par une majorité de téléspectateurs.   
Nouvelle viabilité pour les œuvres issues de la sphère de production restreinte
Le nouvel écosystème que nous venons de décrire participe à la viabilité économique des œuvres audiovisuelles issues de la sphère de production restreinte[4] ou de cultures minoritaires (ethniques, sexuelles, linguistiques, etc.). De telles œuvres s’entourent d’un faible nombre d’amateurs, généralement isolés géographiquement. Dans une logique de diffusion traditionnelle, on ne peut pas à proprement parler de public pour ces contenus. En effet, un quartier ne regroupe pas assez d’amateurs de films de Fritz Lang pour que son club vidéo en tienne la filmographie. Il n’y a pas non plus assez d’Indiens à Sherbrooke pour que ses cinémas projettent les dernières productions de Bollywood. Ce que fait le web social, c’est de constituer des publics de niche rendant possible une certaine rentabilité pour les produits de niche qui lui conviennent.
Le phénomène de longue traîne, auquel le filtrage collaboratif participe, est sans doute celui qui explique le mieux cette structuration de publics spécialisés. La longue traîne se rapporte à la partie du marché dans laquelle une multitude de produits peu en demande ou répondant à des goûts spécifiques sont vendus en petite quantité chacun, mais qui, cumulés, représentent un chiffre d’affaires important. Elle s’oppose à la consommation de masse, qui repose sur un nombre limité de produits très en demande, vendus en grande quantité : les produits de tête (Anderson, 2004). À ce phénomène, il convient d’ajouter l’élargissement du public, à l’échelle internationale, rendu possible par le fansubbing.


Source : Le labo des sciences humaines
Avec le recul de l’intervention de l’État sous la double pression du néolibéralisme et de l’endettement public, il est à prévoir, à long terme, une importante diminution des subventions versées aux projets audiovisuels non-économiquement viables de la sphère de production restreinte et des minorités culturelles, ainsi qu’une diminution du nombre et de la portée des médias issus du service public (à l’image de la Société Radio-Canada, dont le budget ne cesse de fondre depuis la crise économique de 1982) (source : Martin et Proulx, 1995). Les outils et les acteurs du web social, ainsi que la désintermédiation, devraient partiellement compenser le retrait de l’État en matière de culture en augmentant la rentabilité des œuvres qui s’adressent à des publics restreints, en vertu des caractéristiques que nous venons de voir. Cette réalité devrait perdurer à long terme, sans constituer, néanmoins, un mode de financement aussi important que les subventions publiques dans les meilleurs jours de l’ère fordiste.



[1] À cet égard, deux des trois compagnies les plus riches dans les télécommunications sont américaines (AT&T et Verizon Communications). Les trois premières compagnies du domaine du divertissement également (Time Warner, Walt Disney et News Corp.) (selon CNNMoney.com, 2010).
[2] À l’image du personnage Brice de Nice, de Jean Dujardin, créé dans les années 1990 et adapté au cinéma en 2005, après que les internautes en aient relancé le succès.
[3] Notamment en alimentant les systèmes de recommandation par ses activités sur le web ou en facilitant le partage de contenus lorsqu’il télécharge lui-même un fichier sur un logiciel peer-to-peer.
[4] Par sphère de production restreinte, il faut entendre la position du champ de l’audiovisuel « où la valeur symbolique des œuvres prime, où la valeur d'usage (c'est-à-dire le produit ou l'objet : l'œuvre) prime sur la valeur d'échange (la marchandise : le livre) », par opposition à la sphère de grande production « où la valeur d'échange prime sur la valeur d'usage, la valeur économique sur la valeur symbolique. » (source : Jean-Marc Lemelin).

Bilan de l'activité B: Surveillance numérique



  1. Les composantes de notre initiative et leurs liens entre eux.
Le site Surveillance numérique (abrégé en SN dans le cadre de ce travail) est hébergé par Google Sites à l’adresse: https://sites.google.com/site/surveillancenumerique/. Il s’agit de notre page principale. Plus statique qu’un blogue, le site contient des ressources que nous voulons rendre disponibles en permanence. Il est graduellement enrichi de contenus (articles, documents et vidéos) que nous classons de manière à faciliter la compréhension de notre enjeu. Il contient également des liens vers des sites de référence sur l'articulation entre les médias et les droits et libertés des citoyens (par exemple : Mediawatch et La Quadrature du Net) et sur la société de surveillance (Réseau interdisciplinaire Challenge, Campagne internationale contre la surveillance globale, etc.). Enfin, le site met en évidence (sous l’en-tête) des liens vers le blogue SN, les groupes créés sur Facebook et Diigo et vers le blogue que nous avons créé pour l’activité C, Un œil sur les médias. Si celui-ci porte sur l’analyse des médias, il renferme néanmoins des articles pertinents à propos de notre enjeu.  
Le groupe SN créé sur Diigo  (http://groups.diigo.com/group/surveillance-numrique) nous permet de partager des signets avec d’autres usagers et de bénéficier de leurs trouvailles sur les thèmes de la surveillance numérique et de la protection de la vie privée dans les réseaux sociaux. Des liens vers les autres espaces de SN sont placés dans le descriptif du groupe et des signets de chacun des nouveaux contenus que nous publions y sont partagés (en particulier les billets du blogue SN). Certaines étiquettes ont été créées afin de pallier à des lacunes sur Diigo : « dataveillance » et « robots sociaux ». Nous avons donc contribué à enrichir le système de classification de ce site dans le domaine de la protection de la vie privée.
Le blogue de SN (sur Blogger : http://surveillance-numerique.blogspot.com/) nous permet d’effectuer des mises à jour rapides et fréquentes. Il est donc plus dynamique que la page principale. Nous y publions des billets qui relayent l’actualité, qui synthétisent des articles tirés du web ou des publications papier et qui publicisent des événements organisés par Surveillance numérique ou par ses membres. Le blogue tente également d’alimenter les discussions et les débats, grâce aux espaces ouverts aux commentaires.
Le blogue contient, dans la barre latérale, des liens vers la page principale, le groupe SN de Facebook, celui de Diigo et le blogue Un œil sur les médias. Une option permet aux personnes inscrites aux services de Google de s’abonner au blogue. Un fil RSS créé par RSS MIX affiche les nouveaux signets partagés dans le groupe SN sur Diigo, un autre présente les signets publics répondant à une série d’étiquettes en lien avec notre enjeu sur les sites Diigo et Delicious (par exemple : « cybersurveillance » et « cybersécurité ») et un troisième, que nous avons fabriqué à l’aide des outils Feedity et RSS MIX, présente les mises à jour des blogues SN et Un œil sur les médias, ainsi que du site web SN.     
À la suite de chaque billet, des options de partage sont offertes pour favoriser leur diffusion sur d’autres plateformes (Facebook, Blogger, Google + et Twitter) et par courriel.
Le groupe SN sur Facebook (http://www.facebook.com/groups/289339031086513/) nous permet de faire de la publicité pour l’ensemble des espaces de SN auprès des 450 usagers de Facebook qui en sont devenus membres et qui sont principalement issus de notre graphe social. Il diffuse également de l’information, des liens, des contenus et des invitations à des événements. Le groupe est ouvert aux contributions et aux commentaires des autres membres, ce qui en fait un espace de partage et de discussion dynamique.
Une page Facebook publique a également été créée à l’adresse suivante : http://www.facebook.com/#!/pages/Surveillance-num%C3%A9rique/157503731013531?sk=wall. Le but est d’attirer des usagers de Facebook que nous n’avons pas sollicités parmi nos propres « amis » et de favoriser le référencement de SN  par les moteurs de recherche. Ainsi, sur Google,  la page Facebook apparaît comme 10e résultat pour les mots-clefs « surveillance+numérique », alors que le groupe sur Diigo n’occupe que la 75e place et le blogue, la 148e (en date du 30 novembre 2011).
Le blogue et le site web offrent aux visiteurs de s’abonner à un fil RSS pour les tenir à jour des nouvelles publications sur ces deux espaces, sur le blogue Un œil sur les médias et au sein du groupe Surveillance numérique de Diigo. Le fil RSS a été obtenu par le biais de l’outil Feedity.
Le projet dans son ensemble favorise une division des tâches dans la promotion de notre enjeu. Diigo nous permet de bénéficier du filtrage collaboratif opéré par des personnes directement concernées par notre enjeu et qui en sont des spécialistes ou des prosélytes. Leur travail de débroussaillage du web est ensuite relayé sur le site, le blogue, ainsi que le groupe et la page officielle Facebook de SN, qui visent un public plus général, c’est-à-dire celui que nous voulons sensibiliser et informer. En retour, nous avons nourris ces spécialistes et prosélytes avec nos propres signets.


Le public général, peu informé de notre enjeu, en plus d’être la cible privilégiée de notre campagne, a pour fonction de répandre l’information que nous lui divulguons auprès de leur propre graphe social. En nous concentrons sur les médias sociaux, en variant les formes de notre présence sur le web et en décloisonnant les sections du web qui portent sur notre enjeu (réseaux sociaux hétéroclites où l’information circule abondamment versus sites spécialisés où l’information circule dans des cercles restreints), nous espérons que certains contenus que nous partageons avec les internautes connaîtront une propagation virale.


Le choix de Facebook comme outil de promotion n’est pas innocent, car nous voulons cibler les internautes qui sont le plus à même de disséminer leurs informations personnelles sur le web et cette plateforme sociale est passée maître dans l’art de recueillir de telles informations. Il s’agit donc de sensibiliser les usagers là ils sont les plus vulnérables.


  1. Description des activités que nous avons menées.


2.1. Nous avons publié 22 billets sur notre blogue, soit des listes de sites à consulter, soit des articles, soit des résumés d’articles.  


2.2. Nous avons mené une veille sur Google Reader afin de relever des sites, des blogues et des articles pertinents et de les partager avec nos groupes sur Diigo et Facebook (également relayés sur notre blogue par le biais d’un fil RSS et de billets).


2.3. Nous avons partagé 112 signets reliés à notre enjeu avec la communauté Diigo, 61 avec le groupe SN et une vingtaine avec trois groupes Diigo dont nous sommes membre, militant pour des enjeux similaires ou œuvrant dans le domaine des nouvelles technologies. Nous avons aussi partagé nos billets, nos sites et des signets avec le groupe INF6107 (dans le cadre des activités A et C), puis nous avons partagé les signets pertinents de ses membres avec ceux du groupe SN.     


Nous avons enfin invité près de 90 usagers de Diigo à rejoindre notre groupe, qui ont été sélectionnés en raison de leurs intérêts en matière de protection de la vie privée et de cybersurveillance. Pour les trouver, nous avons fait des recherches sur les étiquettes « vie privée », « cybersurveillance » et « surveillance numérique » et avons invité les personnes qui ont posté de nombreux signets en la matière, que nous avons jugé pertinents. De plus, nous nous sommes inscrit à plusieurs groupes Diigo consacrés à des thèmes similaires aux nôtres afin de partager nos signets avec eux et de faire bénéficier leurs trouvailles à nos membres.   


2.4. Nous avons invité tous nos « amis » Facebook à adhérer au groupe Surveillance numérique de cette plateforme, ce qui a permis la venue de plus de 450 membres, puis nous nous sommes inscrit à tous les groupes Facebook francophones portant sur la protection de la vie privée (cinq au total), à la suite de quoi nous avons publié un message d’invitation sur leur mur respectif, afin que leurs adhérents s’inscrivent à notre groupe, ce qui nous a donné accès à environ 4000 personnes déjà sensibilisées à cet enjeu.
Nous avons publié régulièrement des liens et des contenus sur le mur de notre compte personnel et des groupes Facebook auxquels nous avons adhéré, en particulier les billets du blogue SN et des listes de liens trouvés au cours de nos veilles informatives sur Diigo et Google Reader.
Enfin, nous avons répondu aux commentaires et aux questions des membres du groupe et organisé un événement en son sein, au cours duquel les membres étaient invités à partager des solutions avec les autres pour limiter la quantité d’informations personnelles qu’ils essaiment dans leur quotidien (par exemple : payer comptant dans les commerces plutôt que par carte bancaire/crédit, porter une broche infrarouge pour aveugler les caméras de surveillances positionnées dans les espaces publics, etc.). L’événement en question, cependant, est passé inaperçu.


  1. Les statistiques de fréquentation sur notre page centrale.


Le site web :


·         Le site n’a reçu que sept visites et 6 visiteurs différents (en excluant notre présence);


·         Un seul visiteur a réellement visité le site. Il provenait de Diigo, a passé un peu plus de 5 minutes sur le site et consulté 4 pages. Les autres sont restés 25 secondes et moins, le temps de jeter un simple coup d’œil;


·         86 % des visiteurs provenait de Sherbrooke (43 % de la ville même et 43 % d’une municipalité fusionnée), soit des personnes provenant de notre réseau (c’est la ville de résidence d’un bon nombre de nos amis), soit des personnes qui recherchent des internautes vivant près de chez elles et ayant des intérêts similaires;  


·         Le blogue Un œil sur les médias a été notre référent le plus important, avec quatre visites de trois visiteurs. L’analyse des statistiques de ce blogue nous laisse penser que les visiteurs provenaient du site Diigo.


·         Diigo nous a référé le lecteur le plus intéressé, en raison du temps passé sur le site et du nombre de pages vues par ce dernier. Nous pensons qu’il s’agit d’une personne déjà sensibilisée à notre enjeu.  


·         86 % des visiteurs provenaient d’un référant issu de nos activités menées sur le web social et 14 % (1 sur 7) du moteur de recherche Google.


Tableau 1 : visites sur le site web de SN : du 26 octobre au 26 novembre



Graphique 1 : origine géographique des visiteurs du site web de SN



Le blogue :


·         Les visites proviennent de 51 sources, dont 24 sont authentiques, 2 sont suspectes (spamming) et 25 sont le fait d’une activité de spamming.


·         Le principal référant est Google, par le biais des mots-clés « surveillance+numérique », avec 45,8 % des sources authentiques, suivi de Facebook, avec 37,5 % des sources.


·         Les deux autres référents sont le blogue Un œil sur les médias et le site Diigo, avec 8,3% des sources authentiques chacun.


·         3,9 % des visiteurs semblent provenir du moteur de recherche de blogues Realtime Blogsearch. Cependant, puisqu’aucune activité ne provient d’autres moteurs de recherche du même type (à commencer par celui de Blogger, site auquel nous sommes inscrit), nous pensons qu’il s’agit de spams.


·         Les autres visites ne peuvent être prises en compte, puisqu’elles sont le résultat d’une activité de spamming évidente.


·         Plus de la moitié (54,2 %) des sources sont le résultat de notre présence sur le web social.


·         Nos visiteurs proviennent majoritairement du Canada (46%). Le nombre élevé de visiteurs américains, allemands et russes s’explique vraisemblablement par le spamming. Les visiteurs venus de France (5%) proviennent probablement de Diigo et/ou de Facebook, en raison du grand nombre d’amis de notre réseau social et de membres du groupe SN sur Diigo qui vient de ce pays.



Tableau 2 : visites sur le blogue SN: du 29 octobre au 29 novembre




Graphique 2 : origine géographique des visiteurs du blogue SN. Nombre de pages vues

Tableau 3 : origine géographique des visiteurs du blogue SN (%)




Graphique 3 : Répartition des sources légitimes du blogue SN


Tableau 4: répartition des sources légitimes du blogue SN


Tendance générale :


·         Les visiteurs du site web et du blogue SN proviennent pour plus de la moitié (54,2%) des espaces que nous animons sur le web social. Le moteur de recherche Google nous a apporté la balance (45,8%)





  1. Les principaux facteurs qui, selon nous, ont pu aider ou nuire à la visibilité de notre initiative.


Nuisances :


·        Le mauvais référencement du site web dans les moteurs de recherche.


·        Le fait de tenter de rejoindre un public général plutôt que des personnes déjà intéressées par notre enjeu. Leur attention est plus difficile à capter et il est difficile de les inciter à participer aux discussions;


·         Le trop grand nombre de sollicitations que reçoivent les membres de Facebook, qui entrent en concurrence avec nous, ainsi que la gravité du sujet, qui tranche avec la légèreté de la majorité des discussions qui y ont lieu (en particulier dans notre propre réseau, constitué pour le tiers de membres de l’École nationale de l’humour);


·         L’absence de répliques à des billets d’autres blogueurs en rapport avec notre enjeu. De telles répliques et commentaires auraient attiré les blogueurs concernés, ainsi qu’une partie de leurs lecteurs. Cependant, il se serait agit de personnes préalablement sensibilisées.


·         Une mauvaise répartition de notre temps : trop de travail passé à produire du contenu et trop peu sur la discussion et le tissage de liens avec d’autres internautes.


·         Le manque de temps :


a)      Pour nous investir dans la promotion de notre enjeu (aucun temps disponible la fin de semaine, alors que par expérience, nous pouvons dire que c’est le meilleur moment pour être actif sur Facebook et obtenir de la visibilité;


b)      Pour que les personnes que nous rejoignons à l’aide de nos différentes activités parlent de SN et partagent ses contenus parmi les membres de leurs réseaux sociaux;


c)      Pour que ces mêmes personnes se rencontrent, discutent entre elles et s’approprient l’espace convivial mis en place par SN.


Facilitateurs :


·         La multiplicité des plateformes utilisées et des hyperliens qui les relient entre elles;


·         La multiplicité des contenus véhiculés (vidéo, audio, écrits, images);


·         La formation d’une communauté d’intérêts constituée autour de notre enjeu dans Diigo;


·         La valeur ajoutée que nous offrons à l’information et aux contenus que nous véhiculons pour les internautes, en raison du filtrage, du classement et de la synthèse de l’information que nous effectuons;


·         La présence d’un important  réseau social que nous avions établi antérieurement sur Facebook, dans lequel les membres nous font confiance et n’hésitent pas à diffuser notre enjeu au sein de leur propre graphe social;


·         Une conjoncture favorable envers notre enjeu : le mouvement international des Indignés, les démêlées de Facebook avec la justice européenne en raison de la manière dont l’entreprise gère les données personnelles de ses utilisateurs, l’avènement d’un nouveau phénomène inquiétant dans les réseaux sociaux (les robots sociaux), etc.;


·         Des mises à jour fréquentes;


·         La facilité et la multiplicité des moyens, pour les visiteurs, de s’inscrire au blogue et aux groupes sur Facebook et Diigo, ainsi que pour demeurer au courant des mises à jour et des événements liés à SN (les fils RSS, par exemple);